"Dans la vie on a le choix de faire travailler les machines ou de se mettre soi-même à la tâche. Dans le premier cas, nous déléguons à la technique le soin d'assouvir nos besoins. Débarrassés de tout impératif, nous nous dévitalisons. Dans le second, nous mettons en branle la machinerie du corps pour répondre aux nécessités. (...) L'énergie se redistribue. Elle est transférée du ventre des appareils au corps humain.
Au bout de quelques jours, je remarque les premières transformations de mon corps. (...). La tension diminue, le coeur ralentit : confiné dans un espace réduit, j'appends à faire des gestes lents. L'esprit lui-même s'assoupit. Privé de conversation, de contradiction et des sarcasmes des interlocuteurs, l'ermite est moins drôle, moins vif, moins incisif, moins mondain, moins rapide que son cousin des villes. Il gagne en poésie ce qu'il perd en agilité.
Parfois, cette envie de ne rien faire. Je suis depuis une heure assis à ma table et je surveille la progression des rais du soleil sur la nappe. La lumière anoblit tout ce qu'elle effleure. Le bois, la tranche des livres, le manche des couteaux, la courbe du visage et celle du temps qui passe, et même la poussière en suspens dans l'air."
Junger."La démystification vise à rendre les personnes et leur conduite dociles aux lois du monde des machines."
"Constance sent une sève monter dans sa chair ; elle comprend que le progrès désubstantialise le monde. Lawrence met dans la bouche de la jeune femme de prophétiques paroles sur l'enlaidissement des paysages, l'abrutissement des esprits, la tragédie d'un peuple qui perd sa vitalité ("sa virilité" dit-elle) dans les cadences mécaniques. L'amour primitif et pain d'épanouit chez Lady Chatterle en même temps qu'elle assiste au naufrage des âmes modernes, siphonnées par une "sinistre énergie". (...)
Lawrence savait que la campagne est un visage de la beauté."
Dans les forêts de Sibérie, Sylvain Tesson.
" Quand je pense aux inconforts que des Américains en parfaite santé sont prêts à endurer plutôt que de faire un mille ou un demi-mille à pied, les invectives qu'ils supportent et encouragent, s'entassant dans un tramway à la moindre chute de température ou au premier flocon de neige, serrés comme des sardines, suspendus à des poignées, se marchant sur les pieds, respirant l'haleine de leurs voisins, écrasant femmes et enfants, farouchement accrochés à leur petit bout de plateforme, prenant des risques et éreintant les chevaux - je pense que n'importe quel vagabond des rues peut se féliciter du rare privilège d'aller à pieds. En effet, une race qui néglige ou méprise ce don sauvage, qui craint le contact avec le sol, qui ne crée pas de sentiers, ne communalise pas la terre comme leur entretien l'exigerait, qui tient le marcheur pour un violeur de propriété, qui ne connaît de route que la grand route, la chaussée fréquentée par les voitures, qui oublie de ménager des tourniquets, des passerelles, qui va jusqu'à ignorer les droits du piéton sur la voie publique, ne lui laissant d'autre issue que le fossé ou le talus, est en voie de dégénerescence profonde."
John Burroughs.
"la bicyclette est un engin convivial, dans la mesure ou, comme à pieds, nos jambes constituent la force motrice, et la distance parcourue est proportionnelle à l'effort qu'elle fournissent. En revanche, il n'en va pas de même avec l'automobile: avec elle disparaît tout proportionnalité entre notre déplacement et notre engagement corporel dans le mouvement. (...° se propage cette forme de malheur qui consiste, pour un être vivant, à mener une vie éloignée de l'exercice naturel de ses facultés."
Olivier Rey.
Dans les forêts de Sibérie, Sylvain Tesson.
" Quand je pense aux inconforts que des Américains en parfaite santé sont prêts à endurer plutôt que de faire un mille ou un demi-mille à pied, les invectives qu'ils supportent et encouragent, s'entassant dans un tramway à la moindre chute de température ou au premier flocon de neige, serrés comme des sardines, suspendus à des poignées, se marchant sur les pieds, respirant l'haleine de leurs voisins, écrasant femmes et enfants, farouchement accrochés à leur petit bout de plateforme, prenant des risques et éreintant les chevaux - je pense que n'importe quel vagabond des rues peut se féliciter du rare privilège d'aller à pieds. En effet, une race qui néglige ou méprise ce don sauvage, qui craint le contact avec le sol, qui ne crée pas de sentiers, ne communalise pas la terre comme leur entretien l'exigerait, qui tient le marcheur pour un violeur de propriété, qui ne connaît de route que la grand route, la chaussée fréquentée par les voitures, qui oublie de ménager des tourniquets, des passerelles, qui va jusqu'à ignorer les droits du piéton sur la voie publique, ne lui laissant d'autre issue que le fossé ou le talus, est en voie de dégénerescence profonde."
John Burroughs.
"la bicyclette est un engin convivial, dans la mesure ou, comme à pieds, nos jambes constituent la force motrice, et la distance parcourue est proportionnelle à l'effort qu'elle fournissent. En revanche, il n'en va pas de même avec l'automobile: avec elle disparaît tout proportionnalité entre notre déplacement et notre engagement corporel dans le mouvement. (...° se propage cette forme de malheur qui consiste, pour un être vivant, à mener une vie éloignée de l'exercice naturel de ses facultés."
Olivier Rey.
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